à Gilles

Vaccinés

nous devinions toujours le pire
vaccinés contre l’espoir en somme
le cirque avait ses règles et
nous les maîtrisions sur le bout de nos vingt doigts
écorchées les phalanges
tiraillés les adducteurs
il faut bien que les muscles travaillent

ils ont tout essayé
nous avions su rester intègres
apparemment intégrés
les apparences jouaient en notre faveur
peut-être aurions-nous pu en être fiers sauf que
ce n’était pas le genre de la maison

d’une ville à l’autre sur autoroute
la litanie des péages et des stations services et des zones industrielles
les filles qu’on a perdues
celles qui nous ont laissés
nous ne nous inscrivions pas dans la durée

quelques frontières
plusieurs milliers de kilomètres
fatigue teintée de rires et d’alcools
parfois une photographie
parfois un trajet marqué sur la carte au stylo bleu
en marge la date

nous perdions nos forces peu à peu
et nos visages marquaient
on s’en foutait comme du reste

automne 2001

Fatigués

tu me dis ce que je dois
ce que je devrais faire
ce n’est pas bon de rester enfermé chez soi tout le temps
ce n’est pas sain
tu me donnes des conseils
sors
rencontre des gens
cesse de boire seul aussi
tu me prêtes de l’argent
fais pas le con
remets-toi à bosser
je le sais que tu t’inquiètes et c’est gentil de ta part
je ne t’écoute pas c’est tout
j’ai perdu l’habitude d’écouter

rappelle-toi sept mois plus tôt
ton retour de Martinique
le café concert à l’eau et le bateau coulé
nous ne parlions que suicide
nous étions épuisés
tu cherchais un moyen sûr
je vantais l’insuline
dérobais des ampoules au travail
attention nouvelle présentation 1ml = 40000 unités

aujourd’hui tu ne me comprends pas
je ne fais que mettre notre plan en route
c’est tout

Pau, hiver 2000

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