un temps pour tout et toi

le bruit de la chute je ne lui accorde aucune importance depuis le temps
tu devrais le savoir et je ne devrais pas avoir à me répéter aussi
j’en deviens ridicule et pénible et lourd
répétitif
si tu crois que ça m’amuse
que ça m’enchante
tu te trompes au plus haut point

mais par bonheur rien ne bouge
aucun ne se détourne de sa route
d’avance tracée

alors je continue bien malgré nous ce vieux discours
rabâché sans cesse
aucune faute de frappe
aucun double emploi malgré les lassitudes
les réveils hébétés tête lourde
les yeux cernés au-delà du raisonnable
tout ce que nous devions nous dire encore
nous apprendre l’un de l’autre
nous n’en aurons ni l’occasion ni le temps

tiens une porte ouverte si je l’enfonçais ?
peut-être y aura-t-il des surprises
des motifs de plaisir d’émerveillement
de l’inexploré
enfin
quelque chose de mieux
ce serait agréable non ? ça nous changerait du tout venant
ce quotidien dégueulasse où nous périssons les mains vides

tu sais y faire ma belle
je me suis laissé avoir et prendre
à cent pour cent volontaire
prêt à en redemander davantage
n’espérais rien
te désirais cependant
comme j’étais con
toujours les mêmes histoires

à quelque temps de là
quelques centaines de kilomètres

une autre carrière d’autres blocs de pierre et une femme nouvelle
des motifs d’échec inédits
des mots sur les plaies en place d’alcool
le réconfort se fait attendre
le calme idem
sinon ça ne compte pas sinon c’est trop facile
les blessures achevées par manque ou trop plein
cela reviendrait au même si nous en avions les moyens et ce n’est pas le cas
pauvres nous sommes pauvres nous resterons
tant pis pour nos pudeurs

le résultat est invariable le résultat même si je m’en moque
de lui comme du reste
il ne faut rien laisser paraître
il ne faut rien
supplier ou implorer la clémence serait une perte d’énergie ma belle et je n’ai pas que ça à faire pour qui me prends-tu ? je ne suis pas là pour demander pardon mon rôle est de veiller d’importance et je ne te permets pas d’en douter
s’il te plaît vire-moi ce sale sourire de ta jolie face
ou je devrai rectifier ça
ou je devrai oublier ma sérénité
ou je devrai maculer toute notre histoire
l’idée m’indispose

des choix qui n’en sont pas
vous n’avez pas fini de payer pour vos mensonges
vos soucis de bienséance
votre prudence de survivants

une larme telle une bénédiction
une flaque de sang sous la pluie de septembre
et déjà le brouillard
les gelées matinales

Paris, février 1999 (revu début 2015)

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